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Principe 1(Molisson) :
Le design consiste à placer chaque élément du système afin qu’il soit connecté de façon optimale aux autres.
Le collectif de l’îlot des Combes se compose d’une dizaine de personnes. Pour imaginer et mettre en mots notre rêve collectif, nous avons organisé plusieurs séances de réflexions. Nous sommes tout d’abord partis du rêve de chacun :
En écoutant chacun parler, nous avons extrait des mots clés. Avec ce nuage de mots clés issus de nos rêves respectifs, nous avons identifié les 4 grandes composantes de notre futur lieu :
Dans un second temps, des cartes mentales nous ont aidé à détailler ce que chacun mettait derrière ces mots. Nous sommes arrivés à une multitude d’éléments qui pourraient être intégrer à notre design. En recoupant les cartes, nous avons identifiés 6 éléments vitaux pour notre système :
Des abeilles, une collection de plantes médicinales et de légumes anciens, des forêts nourricières expérimentales, des zones et sentiers pédagogiques, un espace formation et un espace de loisirs et détentes.
La première année (2015) a été consacrée à l’observation, une observation qui continue aujourd’hui pour nous permettre d’évaluer l’impact de nos aménagements. De cette observation, nous avons construit différentes cartes que nous faisons évoluer régulièrement et qui nous informent sur les climats et micro-climats, le relief et l’eau, la faune, la flore et le sol et enfin les éléments liés à la présence humaine.
Cela nous a permis d’imaginer et privilégier des aménagements sur la gestion de l’eau, les grands systèmes de productions, les chemins d’accès et les bâtiments.
La carte suivante présente les flux d’énergie, d’eau, de nutriments sur le site de l’ilot des Combes.
En parallèle, un travail important a été fait avec l’architecte du projet pour dessiner les différents bâtiments.
Dès le mois de février 2015, nous avons commencé à implémenter le design :
En parallèle, les chemins ont été tracés et entretenus, les zones de loisirs et détentes installées et aménagées.
Les travaux d’aménagement des bâtiments ont également commencé en 2015 pour se finir en totalité courant 2016.
Il nous reste encore plusieurs zones à aménager. Nous essayons de commencer petit (même si je pense que nous avons commencé beaucoup trop grand !) et chaque année, nous nous fixons un nouvel objectif pour avancer dans l’implémentation en fonction de nos ressources financières et humaines.
Régulièrement, nous nous penchons de nouveau sur le design. Nous profitons souvent de l’arrivée de nouvelles personnes dans l’association pour leur partager les avancées, faire un bilan de ce qui fonctionne bien, moins bien, ou pas du tout, et rechercher des solutions. La partie suivante présente quelques-unes des principales évolutions.
Principe 4 (Holmgren) :
Appliquer l’autorégulation et accepter la rétroaction
Gérer l’eau
Nous avons eu le plaisir d’accueillir Warren Brush qui nous a accompagné pour réaliser notre système de gestion des eaux pluviales. Cela fut un temps fort ! Notre terrain est très en pente, avec plusieurs sources qui arrivent par le haut.
Nous avons sur notre terrain (sans prendre en compte l’aval), une surface de captage en amont de 1,5 hectares environ au-dessus du point clé jusqu’à la route (limite de la propriété).
Notre projet consiste à récupérer ces eaux dans un barrage de stockage au niveau du point clé et de distribuer et ralentir le surplus sur le terrain afin d’infiltrer l’eau et recharger les nappes phréatiques.
Point clé
Principe 5 :
Optimiser les ressources avant qu’elles ne quittent le système
Lors de gros orages, le système fonctionne très bien. Les eaux qui dévalent le terrain viennent se regrouper dans le barrage qui déborde et vient remplir le réseau de baissière.
A plus long terme, nous envisageons de réinstaller une forêt sur cette forte pente (qui se couvre aujourd’hui doucement de ronces). En effet, c’est l’écosystème idéal sur ces fortes pentes pour gérer les eaux pluviales.
Dans ce cas-là, nous envisageons de creuser une nouvelle baissière qui viendrait faire le lien entre les deux bassins. Elle récupère le trop plein de bassin en amont, puis envoie son trop plein dans le bassin et aval.
Celle-ci pourrait infiltrer une partie des eaux de pluies plus en amont pour irriguer ces nouvelles plantations.
Nous prévoyons enfin sur cette zone de mettre des poules entre les haies d’arbres en rotation avec des céréales.
La forêt jardin est l’un de nos sujets favoris ; nous expliquons en effet à notre public que la forêt est l’écosystème naturel sous nos climats et que si nous arrivons à adapter nos forêts à nos besoins tout en maintenant l’harmonie des écosystèmes, nous pourrons apporter des alternatives sérieuses au modèle dominant.
Le projet de départ consistait à planter des arbres fruitiers sur les courbes de niveaux puis de venir ensuite densifier ces haies avec des fruits rouges et quelques aromatiques. Finalement, notre forêt jardin est devenue un lieu où nous expérimentons trois stratégies différentes qui vont d’une forêt presque sauvage à un système hautement organisé pour la production.
Pour Martin Crawford, nos projets devraient plutôt être des lisières que des forêts, car nous avons besoin de lumière.
Il propose une stratégie intéressante dans son livre qui consiste à planter nos arbres fruitiers, puis travailler de manière circulaire autour de chaque arbre pour former un guilde. Avec le temps, ces guildes pourront se rejoindre et former une forêt.
On trouve dans la nature cette stratégie d’installation de forêt, avec de petits bosquets (ronces, arbrisseaux) qui vont finir par se rejoindre et fermer la forêt.
Profitant d’une subvention pour les variétés anciennes, nous avons acheté environ 120 arbres fruitiers que nous avons plantés sur les courbes de niveau avec des espacements de 6 à 7 mètres pour laisser assez de lumière. Puis nous avons installé petit à petit des guildes autour de chaque arbre.
Ces deux photos montrent d’abord le terrain avec les arbres plantés et la préparation de sols faites par une équipe de bénévoles. Le même espace trois ans plus tard avec les étages de végétation qui ont été installés autour d’un Amélanchier.
Principe 9 (Molisson) : Polyculture et diversité des espèces
En 2019, j’ai effectué une formation en Agriculture Syntropique avec Felipe Adamo qui a appris auprès de Ernst Götsch au Brésil. Je ne m’attarderai pas sur les principes de cette agriculture mais simplement ce système a le gros avantage, au Brésil en tout cas, d’être adapté à de grandes surfaces de production. L’idée nous a séduit et nous avons décidé de consacrer une de nos parcelles expérimentales à cette technique.
Nous avons donc acheté un millier d’arbres en 2019 et démarré la plantation de nos haies, toujours sur les courbes de niveau, avec un pattern que je pourrais résumer ainsi :
Et un schéma de plantation pour les haies qui ressemble à cela :
Les bandes d’engrais verts et les haies à biomasse permettent d’enrichir régulièrement les haies fruitières en azote et carbone avec l’objectif d’une autonomie en amendement.
Une partie de cette forêt jardin est en zone 2 et nous essayons chaque année des légumes annuels dans les zones les plus ensoleillées.
Une seconde partie est en zone 3 et donc gérée de manière plus sauvage, avec moins de plantes exigeantes.
L’intérêt principal de ce système est d’adapter les concepts de forêt jardin à la production à grande échelle.
Principe 7 (HoLmgren) :
Obtenir une production
Notre forêt-jardin en zone 4 inspirée des travaux de Maurice Chaudière
Nous sommes dans des espaces difficilement accessibles où la forêt repart spontanément. La première zone a été défrichée en 2015 et s’est rapidement recouverte de genêts à balais. Nous avons installé un poulailler afin que les poules puissent apporter de la fertilité supplémentaire au sol. Quelques arbres ont émergé de cette friche à genêts : chênes, églantiers, aubépines, pommiers sauvages, pruneliers, lilas.
Pour la suite nous envisageons :
Dans une seconde zone, nous sommes sur une friche à acacias et ronces. Ce terrain est un ancien verger abandonné depuis 15 ans. Après avoir supprimé les grands arbres (qui repartent de la base) et créer des chemins, nous avons planté une vingtaine de fruitiers de moyennes tiges et une dizaine de châtaigniers et noyers.
La stratégie est proche du site précédent : nous laissons la végétation spontanée s’installer et limitons son développement par un entretien annuel. Nous entretenons des chemins. Nous plantons des arbres et tentons des greffes sur des sujets sauvages.
Principe 8 (Bill Molisson) : Utiliser et accélérer les successions écologiques
Ce sont donc trois stratégies de forêt jardin reflétant chacune un principe de permaculture et chacune adaptée à une zone.
En résumé, j’aime partir de ce schéma de Martin Crawford qui illustre bien pour moi ce qu’est la permaculture. C’est tendre le plus possible vers un système naturel. Plus nous nous éloignons de ce système naturel, plus il faudra d’énergie pour nous maintenir. C’est le pétrole et les produits de synthèse que nous mettons dans nos systèmes de production classique qui le déstabilise. En se rapprochant de la nature, on diminue petit à petit cette énergie injectée dans le système.
Dans ce schéma, on observe que plus on tend vers la nature sauvage, plus on a de biodiversité, de résilience, d’efficience et plus on diminue l’érosion. Et inversement lorsqu’on s’éloigne du système.
Notre expérience à l’ilot des Combes nous montre que dans la forêt comestible qui est le système le plus proche de la nature (sous nos climats), on retrouve aussi des subdivisions, vers des systèmes qui nécessiteront de moins en moins d’énergie.